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06
Sep
2015

Le commerce personnalisé est l’avenir du commerce

Le commerce connaît en France une évolution paradoxale depuis la fin des années 2000

Le commerce connaît en France une évolution paradoxale depuis la fin des années 2000

Cette évolution résulte de la conjonction de cinq facteurs pour partie indépendants entre – eux :

 

  • Mutations démographiques profondes, sensibles à compter du milieu des années 2000 (ralentissement général de la croissance démographique, augmentation sensible de l’âge médian de la population),
  • Évolutions tendancielles des choix d’allocation de la consommation des ménages en France au bénéfice de l’immobilier, des services immatériels (santé, éducation notamment) et de l’émergence de consommations alternatives (partage, troc, consommation désintermédiée),
  • Rythme de croissance économique durablement ralenti,
  • Réduction du rythme d’évolution du pouvoir d’achat,
  • Arrivée à maturité des NTIC et effervescence de l’e commerce qui révolutionne la relation client, les circuits logistiques et le temps du commerce.

Dans le même temps, de manière somme toute assez paradoxale, le rythme de production d’immobilier destiné à l’implantation de commerce physique traditionnel ne se tarit pas :

  • Le montant annuel investi en immobilier commercial en France est tendanciellement important depuis 2005-2006 et atteint même régulièrement des niveaux records depuis 2012,
  • Le rythme annuel d’autorisations d’exploitation commerciale reste élévé, bien qu’inférieur au pic enregistré entre 2007 et 2011,
  • Ce rythme de construction venant s’additionner à un parc commercial important, situé dans la moyenne haute européenne.

Ce haut niveau d’investissement, qui peut sembler décorrélé de la conjoncture économique générale, trouve son explication dans :

  • Le haut niveau de rendement octroyé par l’immobilier commercial au regard du risque réel, modéré, qu’il génère pour les investisseurs,
  • La structuration très professionnelle et le caractère concurrentiel de la filière du développement immobilier commercial,
  • L’attrait représenté pour les élus par l’affichage de création d’emplois dans le secteur du commerce de détail peu qualifiés et non délocalisables.

On est donc dans une situation paradoxale où :

  • Les fondamentaux du commerce semblent durablement réinterrogés,
  • Les modèles alternatifs connaissent des fortunes inégales : réussite incontestable du e-commerce, du drive, modèles émergents (commerce éphémère, circuit court, commerce collaboratif) encore très embryonnaires, faute de modèles économiques suffisamment stabilisés pour justifier des investissements privés importants et durable,
  • La production d’immobilier commercial traditionnel demeure élevée,
  • La crise du commerce, et de son pendant immobilier commercial, est très inégalement perçue selon les zones géographiques, les formats et les gammes de commerces.

Un avenir probable : le commerce personnalisé

L’avenir du commerce en France n’est ni au statu quo ante, ni à une disparition du commerce physique au profit de modèles alternatifs (e-commerce, circuits courts).

A l’instar de marchés connexes au commerce de masse, qui ont d’ailleurs accompagné son développement en France depuis les années 50 (automobile, radio-télévision), le commerce se segmente en :

  • personnalisant son offre, personnalisation d’ailleurs facilitée par la révolution du big data permettant de bien mieux connaître sa clientèle et de la fidéliser,
  • diversifiant les canaux d’appréhension et d’achat d’un même produit par le client,
  • investissant lourdement sur le back office du commerce (réseaux d’approvisionnement, optimisation logistique, data, CRM, outils prédictifs…).

Ce mouvement de personnalisation du commerce se traduit par la réussite des sites à forte identité (grands centres commerciaux, leaders sur leurs zones de chalandises, retails parks attractifs et rénovés, flagships de centre-ville) ou à forte capacité de captation de clientèle (commerces de flux).

Il se traduit en revanche par une lente déréliction des formes urbaines dédiées au commerce qui, soit ne permettent pas de toucher une clientèle précise, soit n’offrent pas des conditions optimales de fonctionnement. Cette crise ne se limite pas à une typologie urbaine spécifique. Elle touche les centres villes, les faubourgs comme les périphéries dès lors que l’actif commercial implanté ne répond pas à ces deux fondamentaux. Dans un environnement économique contraint, ces sites en difficulté sont alors appelés à disparaître progressivement et à générer des friches, ce qui peut apparaître comme un phénomène nouveau en France mais est déjà bien ancré dans de nombreux pays.

Comment concevoir le commerce en ville ?

Concevoir le commerce en ville c’est d’abord, préalablement à tout projet, s’approprier les logiques de segmentation du marché du commerce en distinguant les sites et projets commerciaux non plus seulement par forme urbaine ou localisation dans l’agglomération (centre-ville, périphérie, centre commercial, retail park…), mais par publics visés par l’offre envisagée et types d’attentes de ce public en termes d’accessibilité, d’offre, de services connexes.

C’est ensuite chercher à développer une offre la plus diversifiée possible capable de répondre aux aspirations d’une clientèle soucieuse de service personnalisé :

  • il n’est plus question de seulement veiller à répartir sur le territoire des offres très homogènes partageant ou disputant leurs zones de chalandise respectives,
  • il est plutôt question, tout en préservant une offre massifiée de milieu de gamme répondant à des besoins d’achat fonctionnels, d’enrichir celle-ci par la préservation et/ou le développement de sites à l’identité très affirmée, visant un moment d’achat spécifique et proposant les services adaptés à ce moment d’achat (livraison, points-relais, hybridation de services, activité événementielles connexes…).

Concevoir le commerce en ville c’est être également exigeant vis-à-vis des porteurs de projet, publics comme privés :

  • être sélectif dans le développement de projet,
  • vérifier l’adéquation du projet avec les aspirations de la clientèle visée (examen des motivations et temps de visite, vérification des types d’offre attendue, examen de la sensibilité de la clientèle à tel type d’innovation),
  • s’assurer de la réalité (notamment économique) des ambitions proposées et notamment des investissements de personnalisation de l’offre (traitement d’ambiance, richesse des services proposés, qualité de l’accueil, enrichissements de l’offre vers le loisirs, la culture, la gastronomie…),
  • veiller à la réversibilité des aménagements proposés.

C’est aussi être prudent vis-à-vis des raisonnements de facilité pour lesquels le commerce est simplement perçu comme un facteur d’équilibre financier d’opération et/ou un facteur d’animation urbaine. Un équipement commercial ne peut répondre à ces deux aspirations que s’il fonctionne correctement et pour ce faire doit préalablement rencontrer sa clientèle…

C’est enfin anticiper la génération de friches et accompagner leur transformation, notamment au profit de l’habitat, dès lors que les questions de desserte, d’équipement public et d’environnement le permettent.